Source : Mission Ecoter | (10.01.20)

JEAN ROTTNER VICE-PRESIDENT DE LA MISSION ECOTER

Crédits photos : Région Grand Est

« Il s’agit de permettre à nos territoires de disposer des mêmes chances dans le déploiement des services numériques »

Ancien Maire de Mulhouse, Jean ROTTNER est Président de la Région Grand-Est depuis octobre 2017. Homme de terrain, passionné par son territoire, ne maniant pas la langue de bois, il croit fermement à la transformation numérique, à la seule condition de ne pas oublier l’humain. Fraichement nommé Vice-Président de la Mission Ecoter, Jean ROTTNER croit en l’alliance des territoires afin de contribuer conjointement au développement du Numérique et de nos économies.

Stadler-grand-est-JeanRottner2017-10-24.jpgMission Ecoter : Monsieur le Président, le Numérique est un grand défi pour nos territoires car il est, et restera, un véritable accélérateur de croissance, un réel outil de lien humain, de valorisation et d’innovation. A cet effet, pouvez-vous nous faire état des grands projets de la Région Grand Est liés au Numérique ?

Jean ROTTNER : Ma conviction est que le Numérique rebat profondément les cartes des modèles classiques de fonctionnement des collectivités publiques et de l’ensemble de notre société. Il s’agit d’une révolution certes technologique mais aussi et surtout d’un bouleversement de nos habitudes de vie. Il faut donc anticiper, accompagner voire amplifier cette révolution, au service de nos territoires, de nos concitoyens et des acteurs de notre Région. Le numérique abolit le temps, les distances, bientôt la barrière des langues et il crée un réseau d’expertises et de compétences qui bouleversent les hiérarchies traditionnelles. Dans ce cadre, j’ai placé mon mandat régional sous le signe de l’innovation et de l’ambition pour construire le monde de demain.

Et le numérique est un outil au service de cet objectif.

Je souhaite que notre Région puisse devenir une référence en matière de digital. A mon sens, deux grands types d’enjeux se présentent à nous pour réussir :

Un enjeu d’organisation interne : nous devons acculturer nos 7 500 collaborateurs avec le potentiel que recèlent les nouvelles technologies et la nouvelle organisation du travail qui en découle (plus de transversalité, d’agilité, de réactivité, d’attention à l’expérience utilisateur…) induites par la nouvelle culture digitale.
Ce volet « institution » doit permettre à la collectivité de mettre en place une véritable e-administration en capacité de fournir des services numériques plus efficaces et plus en proximité pour nos concitoyens. Ces derniers doivent être au cœur de nos politiques publiques pour répondre à leurs attentes et avoir un véritable impact positif sur leur quotidien ;

Un enjeu d’accompagnement des transitions (numérique, écologique, énergétique) sur l’ensemble du périmètre régional dans le cadre de nos grandes compétences : développement économique, mobilités, lycées, formation, emploi, santé…
Dans le cadre de ce volet « externe », la Région doit faciliter la transformation digitale des entreprises, renforcer l’écosystème numérique (dont les startup), aider les collectivités à déployer des services correspondant aux besoins en termes d’usage (télémédecine, formation à distance, mobilité à la demande…), renforcer l’offre de formations innovantes pour répondre aux besoins en compétences des entreprises (développeurs, industrie 4.0…).

Sur le volet externe, la Région possède déjà un temps d’avance dans 3 domaines :

  • Le plan THD, qui permettra de déployer la fibre jusqu’à l’abonné sur l’ensemble du territoire régional d’ici à 2023 avec une priorité donnée aux territoires les plus ruraux. C’est plus de 2 milliards d’euros investis et tous les villages, emailing/fibres-optiques.jpgtoutes les villes, qui seront touchés.
  • Le lycée 4.0 qui remplace les manuels par des ressources numériques grâce à un ordinateur que la Région octroie à chaque lycéen dès le début de son curcus.
  • Le programme « Industrie du futur » qui a déjà permis d’accompagner la digitalisation de plus de 500 entreprises et qui est reconnu par la Commission européenne.
    Aujourd’hui, notre défi est de renforcer la visibilité et l’efficacité de nos politiques digitales dans le domaine de la formation professionnelle, de la e-santé, de la transition écologique…

Mais il nous faut également anticiper les prochains usages et les technologies de rupture (blockchain, cybersécurité, cloud, objets connectés). Après la présentation, en juin 2019, de notre plan régional « Intelligence artificielle » qui ambitionne de créer une véritable « vallée européenne de l’IA » – de Dunkerque à Bâle – en fédérant universités, laboratoire de recherche, entreprises et startups autour de nos domaines d’excellence que sont l’industrie, la bioéconomie et la santé, nous travaillons actuellement à la structuration de la filière numérique sur tout le périmètre du Grand Est pour constituer une véritable « task force » d’offreurs de solutions locaux.

Enfin, cette transformation digitale ne doit pas oublier l’humain : il faut permettre à nos habitants de se saisir des nouvelles opportunités qu’offre le numérique sans négliger les réticences ou les craintes (données personnelles, télémédecine, manque de transparence des algorithmes, intelligence artificielle…). L’innovation doit être responsable et inclusive et c’est aussi notre mission de veiller à l’acceptabilité de ces mutations. Cette exigence est notamment présente dans le Plan pour l’IA où une grande place est réservée à l’appropriation de ces nouveaux outils.

M.E. : Le Numérique dans les Territoires est dans l’ADN de la Mission Ecoter, vous venez d’en être nommé Vice-Président, comment entrevoyez-vous cette nouvelle responsabilité ?

emailing/JR2.jpg J.R. : En tant que Président de Région, je suis très heureux de pouvoir poursuivre mon engagement en faveur du numérique. Il s’agit d’une conviction profonde. J’ai déjà pu, lorsque j’étais Maire de Mulhouse, travailler sur ces thématiques au sein de l’Association des Maires de Grandes Villes (AMGVF, devenue France urbaine) ou de l’Association des Maires de France où je co-présidais la Commission numérique.

Ces fonctions m’ont permis de mieux appréhender les attentes de territoires de tailles très différents. Cette expérience m’est précieuse aujourd’hui dans mon mandat de Président de Région. Le Grand Est est une terre de diversité où chaque territoire dispose de ses propres spécificités, de son histoire.

Dans ce cadre, il s’agit de permettre à nos territoires de disposer des mêmes chances dans le déploiement des services numériques : grandes villes, villes moyennes, bourgs-centre, villages, etc. Le digital doit être vecteur de lien, pour réduire les fractures territoriales, sociales, économiques. La Région peut agir à plusieurs niveaux (financier, ingénierie, meilleure connaissance de l’offre disponible, mise en réseau des collectivités avec les offreurs de solutions du territoire…) Or la Mission Ecoter possède une véritable expertise sur laquelle je compte capitaliser pour mieux orienter et calibrer les dispositifs que nous mettons en place sur des problématiques comme les tiers-lieux, le co-développement, la mutualisation, l’inclusion numérique…

A titre personnel, je crois beaucoup à l’alliance des territoires, à notre capacité collective à contribuer conjointement au développement de nos économies en partageant les ressources, les solutions technologiques et les bonnes pratiques. C’est une vision de la décentralisation que j’entends encourager. Et je pense être, de ce point de vue, en phase avec beaucoup de ceux qui s’investissent depuis longtemps dans la Mission Ecoter.