2 questions à… Jean-Pierre GRAND, Sénateur de l’Hérault

Ancien collaborateur de Jacques Chaban-Delmas et ancien Député, Maire de Castelnau-le-Lez (34) durant trente-cinq ans, Sénateur de l’Hérault depuis 2014, Jean-Pierre Grand est un homme de terrain, fervent défenseur des collectivités locales et territoriales avec, en point de mire, la nouvelle et incontournable étape de la décentralisation complétée par la déconcentration.

Mission Ecoter-France et Territoires Numériques : Monsieur le Sénateur, le Sénat assure la représentation des collectivités territoriales de la République. A ce propos, au fil des ans et souvent par effets d’annonces, la question a souvent été posée quant à son éventuelle suppression, or, force est de constater qu’aujourd’hui le Sénat ne peut plus et ne veut plus se contenter d’être une assemblée secondaire. Quel est votre sentiment ?

Jean-Pierre Grand : Le Président de la République est élu pour 5 ans. Les Français savent que les élections législatives qui suivent l’élection présidentielle, doivent permettre au Président nouvellement élu de disposer à l’Assemblée nationale d’une majorité de députés permettant à son Gouvernement de gouverner et d’appliquer le programme présidentiel.

Ce que les Français ignorent trop souvent, c’est que le Parlement, en démocratie, dispose d’un rôle essentiel, celui de contrôler l’action du gouvernement.

Le Parlement en France, ce n’est pas que l’Assemblée nationale, c’est aussi le Sénat de la République. L’élection des sénateurs est découplée de l’élection du Président de la République, ce qui rend la Haute Assemblée bien plus libre de ses choix, de ses votes, de ses contrôles, que l’Assemblée nationale.

Cette explication, ajoutée à la qualité reconnue du travail législatif des sénateurs, démontre que notre démocratie et sa constitution ne pourrait s’accommoder d’une seule chambre.

Cela s’appelle l’équilibre des pouvoirs, essentiel en démocratie.

La nouvelle et incontournable étape de la décentralisation sera de la compléter, c’est la déconcentration

Mission Ecoter-France et Territoires Numériques : Dans quelques mois, nous fêterons le 40ème anniversaire des lois Defferre, Gaston Defferre qui, dans son discours du 27 juillet 1981, disait : « La France profonde est dans nos villes, dans nos villages. Elle aspire à tenir sa place, à être considérée, à jouer son rôle, à choisir son destin. » A cet effet, ne pensez-vous pas que, malgré les différentes réformes et actes de décentralisation de ces quatre décennies, il faudrait sans doute aller plus loin encore et lâcher davantage la bride aux territoires ?

Jean-Pierre Grand : J’ai eu la chance de connaître comme Maire, élu en 1983, l’application effective et heureuse des lois de décentralisation dites « lois Defferre ».

Je conserve le souvenir de la liberté d’investissement qui nous a permis de mettre en œuvre, en toute indépendance de l’État, les services et équipements nécessaires pour nos villes. Un seul exemple, les constructions dans nos communes de nouvelles écoles maternelles et primaires, modernes et fonctionnelles, en furent l’illustration.

Il en fût de même pour toutes les compétences des collectivités territoriales.

Aujourd’hui, on mesure le chemin parcouru avec toutes les évolutions législatives qui ont complété et renforcé la décentralisation.

La nouvelle et incontournable étape sera de la compléter, c’est la déconcentration.

La mise en œuvre des grands équipements publics, les projets structurants, les équilibres territoriaux, aujourd’hui la crise sanitaire, mettent en lumière la nécessaire synergie entre nos territoires, leurs élus et l’État.

La déconcentration devra s’accompagner de diverses mesures constitutionnelles pour renforcer le lien État – Territoires sans mettre en péril l’unité de la Nation.

Propos recueillis par Alain MELKA et Quentin MEULLEMIESTRE