Intérêt général et partage des données :

un cadre de confiance à inventer

L’Observatoire Data Publica vient de publier un cahier de recherche sur la construction de cadres de confiance pour le partage de la donnée au service de l’intérêt général. Un vaste sujet qui intéresse un grand nombre d’acteurs publics et privés impliqués à divers titres dans la gestion d’activités génératrices (et consommatrices) de données de plus en plus massives.

Tout commence souvent par de l’open data. En France, près de 800 collectivités locales publient régulièrement des données. Elles le font en réponse à une obligation légale ou par choix politique de la transparence. Elles ont souvent l’espoir que ces données vont être utilisées par des partenaires économiques pour créer de nouveaux services.

Six ans après le vote de la loi pour une République numérique, les territoires les plus en pointe en matière de gestion et de publication des données font deux constats. Le premier est amer : les promesses de création de richesses (et d’emplois) née de la « libération » des données publiques ne sont pas au rendez-vous. Le second est enthousiasmant : l’ouverture des données publiques a servi de première étape et d’apprentissage pour de nombreuses administrations territoriales et les initiatives foisonnent d’utilisation des données par les collectivités par elles-mêmes et pour elles-mêmes. Un troisième constat émerge : pour optimiser la gestion publique, pour améliorer la connaissance des territoires, pour engager de nouvelles politiques, les données publiques prennent une immense valeur lorsqu’elles sont croisées avec des données privées qui revêtent alors un caractère d’intérêt général. C’est bien sûr le cas des données des entreprises qui interviennent pour le compte des acteurs publics, mais aussi de nombreuses entreprises dont l’action a un impact sur le territoire. En matière de mobilité, d’environnement, d’énergie, de santé… l’action publique a aujourd’hui besoin que des données publiques et privées soient partagées, croisées, échangées.

Mais ceci ne coule pas de source. Dans l’attente d’un futur cadre européen (qui définira les principes d’un « altruisme des données »), plusieurs territoires inventent aujourd’hui en France des « cadres de confiance » permettant le partage de ces données en respectant des principes essentiels : la protection des données personnelles des habitants d’abord, le respect du secret des affaires des entreprises ensuite, et en retour une limitation de certains usages au service exclusif de finalités d’intérêt général.

Le Cahier n°1 de l’Observatoire Data Publica présente et analyse, pour la première fois en France, des expériences pionnières : le Climate Data Hub de la Région Centre Val de Loire, Occitanie Data, le programme « Data & Quartiers », le projet brestois de « Mutuelle de la donnée » et d’autres encore. Des éléments de comparaison internationale sont proposés, avec en balance le modèle anglo-saxon des data trusts. Des repères méthodologiques sont aussi rassemblés. Et si l’on devait ne retenir qu’un enseignement à la lecture de ce document auquel de nombreux experts ont contribué, ce serait qu’en matière de gestion des données, comme ailleurs, la confiance ne se décrète pas. Elle se construit.

Jacques PRIOL

Président du cabinet CIVITEO, Président de l’Observatoire Data Publica, Expert associé auprès du partenariat mondial sur l’intelligence artificielle

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