« Loin de remplacer l’humain, l’IA peut libérer du temps pour renforcer l’écoute et le dialogue avec les habitants »
L’intelligence artificielle (IA) n’est pas qu’une affaire de grandes métropoles ou de laboratoires high-tech. Elle est aussi un défi et une opportunité pour nos territoires ruraux.
Lorsqu’on parle d’intelligence artificielle, on imagine souvent des algorithmes complexes dans des centres de recherche, bien loin des réalités de nos communes. Mais la révolution technologique en cours concerne tout le monde.
Reste à savoir comment nous, élus locaux, citoyens, acteurs économiques et associatifs, allons-nous en saisir pour qu’elle devienne un levier de progrès plutôt qu’un facteur d’exclusion.
L’IA est déjà présente dans nos vies, parfois sans que nous en ayons pleinement conscience. Pour les collectivités locales, elle représente un formidable outil de simplification administrative. À l’échelle d’une mairie comme la nôtre, elle peut aider à rédiger des courriers, des délibérations, automatiser certaines tâches chronophages, répondre aux questions des administrés via des chatbots, ou encore analyser des données pour mieux orienter nos politiques publiques. Loin de remplacer l’humain, elle peut libérer du temps pour renforcer l’écoute et le dialogue avec les habitants.
Mais l’IA ne se limite pas à l’administration. Elle peut être une alliée précieuse pour relever les défis majeurs de nos territoires, qu’il s’agisse de l’accès aux services publics, de la transition écologique ou du développement économique.
L’IA pour dynamiser nos services publics
Dans nos communes rurales, la question des services publics est cruciale. Loin des grandes agglomérations, nous faisons face à des défis spécifiques : Lutte contre l’isolement, accès aux soins, mobilité, gestion des ressources et maintien d’un service de proximité pour nos habitants. L’IA peut nous aider à répondre à ces défis.
Prenons la santé : dans un contexte de désertification médicale, l’intelligence artificielle offre des solutions concrètes. Grâce à la téléconsultation assistée par IA et à des dispositifs de diagnostic à distance, nous pouvons améliorer la prise en charge des patients. Il ne s’agit pas de remplacer nos professionnels de santé, mais bien de les épauler en optimisant le temps médical et en facilitant l’accès aux soins pour tous.
Autre enjeu majeur : la mobilité. Nos territoires souffrent d’une offre de transport limitée. L’IA peut améliorer les transports en commun et le covoiturage en analysant les flux de déplacements et en proposant des solutions adaptées en temps réel. Plutôt que des bus vides aux horaires figés, imaginons un système dynamique, intelligent et économique qui optimise les trajets en fonction des besoins réels des habitants.
IA et transition écologique : un atout pour nos communes
En tant que maire, je suis convaincu que l’indispensable transition écologique doit être pensée à l’échelle locale. Que c’est dans nos territoires ruraux, là où se trouve l’agriculture, la sylviculture, les espaces naturels et la biodiversité que se jouent les plus grands défis.
L’IA peut être un outil puissant pour nous aider à gérer nos ressources de manière plus durable.
Dans la gestion énergétique, par exemple, elle permet d’optimiser la consommation des bâtiments publics en ajustant le chauffage et l’éclairage en fonction de l’occupation réelle. Elle peut aussi nous aider à mieux surveiller la qualité de l’air et de l’eau, à prévenir les risques climatiques ou à anticiper l’entretien des infrastructures communales.
Nos agriculteurs aussi peuvent bénéficier de ces avancées : capteurs intelligents, prévision climatique améliorée, optimisation de l’irrigation… autant de solutions qui allient performance économique et respect de l’environnement.
Un défi d’inclusion numérique pour nos territoires
Mais pour que l’IA profite réellement à nos territoires, il faut d’abord lever un obstacle de taille : l’accès au numérique. Trop de foyers sont encore mal couverts en internet, trop d’habitants se sentent exclus face à la dématérialisation des services, et le développement de l’IA risque d’aggraver cette fracture.
Il est donc impératif d’accompagner cette transition avec des formations, des médiateurs numériques, et surtout une réflexion collective sur la place de l’humain dans ces transformations. L’IA ne doit pas être un facteur d’exclusion supplémentaire, mais au contraire un levier d’émancipation pour tous.
Une intelligence artificielle au service des territoires, pas l’inverse
Plutôt qu’une menace, l’IA me semble surtout un formidable outil de revitalisation pour nos territoires ruraux, à condition que nous nous en saisissions intelligemment et en responsabilité. Son développement ne doit pas être dicté uniquement par des logiques économiques, mais bien par un projet de société qui place l’intérêt général, la solidarité et l’équité territoriale au cœur des priorités.
C’est à nous, élus locaux, de porter cette vision. D’expérimenter, d’innover, mais aussi d’encadrer ces évolutions pour qu’elles restent au service des citoyens. L’IA peut renforcer nos services publics, améliorer notre cadre de vie et soutenir notre transition écologique. Mais elle ne doit jamais remplacer le lien humain qui fait la richesse de nos communes.
Il ne tient qu’à nous d’en faire un outil d’avenir pour nos territoires ruraux.
Lionel MONTILLAUD, Maire de Sainte-Hélène, Conseiller à la Ruralité et à l’Innovation de Mission Ecoter.